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DU 13 AU 15 AOUT 1944 : LIBÉRATION DE TRÉGUIER
C'est après la Libération du secteur de Lannion que la commission départementale a attribué des grades aux différents responsables, dans cette commission siégeait entre autres Louis PICHOURON le commandant ALAIN, je fus nommé lieutenant (2 barrettes ou 2 galons).

Le 12 août 1944, nous avons reçu ordre de l'État-Major FFI commandé par MARCEAU de son vrai nom Yves LE HEGARAT (instituteur en poste à Ploeuc-du-Trieux) de rejoindre Tréguier afin de participer à la libération de ce secteur.

Nous nous sommes rassemblés au bourg de Louargat et sommes partis en camion nous arrêtant au passage à Pluzunet sur la place du bourg pour prendre des camarades. Ayant été nommé lieutenant et n'étant pas attaché au port des galons jugeant cela inutile, 5 ou 6 camarades dont Raymond GUESCLOU et un boulanger de Cavan (son nom m'échappe) me tombèrent dessus, ils me retirèrent ma veste, un autre camarade m'accrocha sur les épaules par je ne sais plus quels moyens 2 galons improvisés.

Arrivés à Tréguier, à l'entrée de la ville, nous avons mis en batterie notre FM, mais n’avons eu aucun contact avec l'ennemi. Dans la soirée a eu lieu la reddition des Allemands.
Le lendemain matin, nous avons rejoint les quais en vue de passer de l'autre côté de l'estuaire du Jaudy. C'est à cet endroit qu'un civil de Tréguier venu en curieux a reçu un obus de mortier qui l’a tué net. C’est aussi à cet endroit qu’un gars du groupe de Bégard, un nommé LE LUYER, qui était monté sur un talus, a été blessé par une balle reçue en pleine poitrine. Quant à nous, à bord d'une barque, nous sommes passés du côté de Trédarzec et, toujours prêts à mettre en batterie notre FM, avons poursuivi à pied, cherchant le contact avec les Allemands, mais toujours en vain et avons continué ainsi jusqu'à Pleubian où nous avons appris que tout était terminé pour le secteur qui était libéré.
Yves OLLIVIER s’est rendu à Crec'h-Maout en Pleubian avec son groupe de Pluzunet ; quant à nous, nous avons reçu ordre de rentrer à Louargat ; des camarades sont partis sur Lézardrieux pour participer à la libération de la ville puis à celle de Paimpol.

Relevé aux Archives Départementales :
Le 12 août 1944, un convoi composé de 4 camions et d'une voiture de tourisme et venant de Lézardrieux traversent la commune en direction de Tréguier, ils se disposaient à franchir le pont Canada limite de la commune avec Tréguier, quelques coups feux tirés de l'autre côté de la rive les firent reculer, ils se camouflèrent dans le tournant le plus voisin du pont.
Après un moment les patriotes s'avancent sur le pont avec un drapeau blanc, voulant parlementer. Les Allemands de leur côté s'avancent, après un pourparler de quelques minutes dans lequel les patriotes demandaient aux Allemands de se rendre, ceux-ci répondirent que telle n'était pas leur intention, et qu'à leur tour ils les sommaient de se retirer sans quoi ils allaient revenir avec un bataillon de renfort et qu'ils anéantiraient la ville.
Il s'en suivit un feu nourri de part et d'autre, sans résultat, après une demi-heure de lutte les Allemands se retirèrent, tout en continuant de tirer de leur camion avec leurs mitrailleuses sur un parcours d'environ trois km.
Le 13 août 1944, à la pointe du jour les Allemands réapparaissaient à nouveau en force et, armés de quelques pièces d'artillerie, ils prennent position dans les crêtes de Crec'h-Erustal et Ursumel qui dominent Tréguier.
Après avoir sondé les alentours, aucun obstacle n'étant en vue sur l'autre rive, ils hasardent une patrouille sur le pont qu'ils passent sans encombres ; toute la colonne descend sur Tréguier par la suite.
Les patriotes qui étaient du maquis de Bégard et de Plouaret, accompagnés de quelques résistants de Tréguier, ne se trouvant pas en nombre pour subir une forte attaque et démunis d'artillerie s'étaient retirés pendant la nuit.
Les Allemands prenant 5 otages sans faire de mal à la ville décidèrent de faire une incursion sur la côte, poussèrent jusqu'à Perros-Guirec, n'ayant trouvé aucune résistance en retournant ils lâchèrent leurs otages.
Le 14 août, jour de la délivrance de Tréguier par les patriotes et américains, les avions américains survolant les ponts de Tréguier manquèrent leur et causèrent de très sérieux dégâts sur le territoire de la commune où la chute d'une douzaine de bombes fut enregistrée sans toutefois qu'il y eut de blessé.
Dans la soirée, vers les 18 h, les riverains de Trédarzec assistèrent avec joie à la prise du dernier point de résistance des Allemands de Tréguier par les tanks américains, accompagnés des patriotes de toute la région trégorroise ; le point de résistance était la propriété de Ville-Neuve ancien dépôt de Lagaste où une soixantaine de boches s'étaient réfugiés.
La reddition ne se fit pas attendre après dix minutes de tirs nous vîmes arborer le drapeau blanc et le défilé des prisonniers commence, la ville était définitivement libérée vers 21 h nous attendîmes une forte explosion c'était le grand pont Canada reliant Trédarzec qui sautait, les alliés craignant une attaque des Allemands stationnés encore en force à Lézardrieux n'eut lieu dans la nuit après cette précaution, Lézardrieux se trouvant seulement à 8 km de Tréguier cette précaution ne fut pas superflue.
Le 15 août à l'aube les habitants du bourg de Trédarzec virent descendre sur Tréguier un grand convoi composé de camions, voitures touristes, compagnies de cyclistes et de pièces d'artillerie depuis le bourg de Pleumeur-Gautier distant de Tréguier de 6 km les Allemands méfiants ne s'avançaient qu'avec prudence une fois le bourg de Trédarzec passé, abandonnant la grand route, il prirent les petits chemins détournés qui conduisent en face Tréguier, ils ne furent pas longtemps à distinguer les tanks et les blindés américains en face d'eux sur les quais et ouvrirent sur eux et sur la ville un feu nourri.
Les alliés alertés se mirent vite en position et la lutte commence par dessus du Jaudy, ils se trouvaient à trois à 400 mètres de distance le combat dura environ 4 h.
Le résultat fut le suivant, du côté des alliés un blessé du côté des Allemands un canon démoli et les artilleurs environnants ou tués ou blessés les Allemands s'en allèrent emportant leurs victimes en camion, un vieillard fut tué net par une balle perdue.

Un stationnement de quelques de minutes que les Allemands firent dans le bourg au retour ne causa pas de dégâts, ils essayèrent de rentrer à la mairie mais celle-ci était fermée et ils n'insistèrent pas.
A 14 h, les FFI les premiers entrèrent au bourg, suivis des américains avec leurs blindés, la population enthousiasmée les acclamaient et chacun avec un groupe de maquisards ou d'américains rentrèrent chez eux les recevant de leur mieux, ce fut la fête jusqu'au soir où les patriotes partirent à nouveau s'approchant de Lézardrieux préparant l'attaque pour le lendemain.
Les américains patrouillèrent avec les gars de la commune pour s'assurer du dégagement complet de celle-ci et partirent à leur tour le 16 au matin pour Lézardrieux sauf quelques éléments qui restèrent pour recevoir et garder les prisonniers qui pourraient être refoulés vers notre commune, ceux-ci commencèrent à arriver vers les 10 h et restèrent au milieu d'un champ loin de la foule qui ne cessait de les invectiver jusqu'à ce qu'il y eut la contenance d'un camion pour leur départ vers une destination qui nous était inconnue
Le lendemain 17 août les alliés partirent définitivement, depuis la veille au soir la garnison de Lézardrieux avait capitulé nous étions enfin délivrés de l'oppression nazie.
Fait à Trédarzec le 24 octobre 1944, le maire PERROT.


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