L'ABBÉ YANN PERROT
NATIONALISTE BRETON


► Lettres écrites par l'abbé Yann Perrot à Yann Fouéré le 7 mars 1943


qui était l'abbé Yann PERROT ?
L'abbé Jean-Marie Perrot, né en 1877 et exécuté par la Résistance le 12 décembre 1943, fonda en 1905, lors du congrès de l'Union régionaliste bretonne, le Bleun Brug, association catholique visant à défendre les valeurs de la foi catholique en les associant à celles du nationalisme breton.
Il prit à partir de 1911 la direction de la revue Feiz ha Breiz (" Foi et Bretagne ") sur les mêmes bases idéologiques : le salut de la Bretagne, soumise à l'emprise des idées des Lumières depuis la Révolution française, ne pouvait passer que par la religion et par le breton, la langue des origines voulue par Dieu pour les Bretons.
Rien d'étonnant donc s'il compta au nombre des premiers adhérents du mouvement Breiz Atao fondé en 1919 par des militants d'extrême droite proches de l'Action française. Breiz Atao allait rapidement trouver l'appui des services secrets allemands favorisant en sous-main les mouvements séparatistes : ainsi Alsaciens, Flamands, Corses et autres militants ethnistes assistèrent-ils en 1927 à la fondation du Parti autonomiste breton à Châteaulin. L'abbé Perrot y prit la parole pour exprimer en termes exaltés sa louange du patriotisme breton.
Dirigé par Maurice Marchal (dit Morvan Marchal) et Olivier Mordrelle (dit Olier Mordrel), ce parti était d'ores et déjà engagé sur les bases racistes qui allaient mener le mouvement nationaliste breton à une collaboration résolue avec les nazis. Marchal, l'inventeur du drapeau breton, fonda une revue druidique antisémite sous l'Occupation, tandis que Mordrel, qui resta jusqu'au bout fidèle à ses idées, fut condamné à mort par contumace à la Libération.
Exaspéré par l'extrémisme militant de l'abbé Perrot, l'évêché de Quimper le nomma en 1930 à Scrignac, paroisse rouge entre toutes. Il était, comme il le fut toujours, en relation étroite avec les militants nationalistes de Bretagne et d'ailleurs (ainsi l'abbé Gantois, un Flamand qui, lui aussi, fut partisan d'une alliance avec les nazis, et divers Allemands, dont Von Tevenar, agent de l'Abwehr, qu'il recevait avec les chefs de Breiz Atao).
Loin de désapprouver la dérive nationale-socialiste du mouvement breton, il appuya la mouvance la plus extrémiste. Le meilleur exemple est offert par l'épisode du " débarquement de Locquirec " : en 1939, des activistes bretons sous la direction de Célestin Lainé, organisent avec les services secrets allemands une livraison d'armes par bateau à Locquirec pour lutter contre la France avec les Allemands. Une caisse tombe à l'eau. Les tracts qui accompagnent ces armes indiquent : " Pourquoi les Bretons se feraient-ils tuer pour la Pologne ? Aider la Pologne, c'est la mort de 500 000 Bretons. La Bretagne sera envahie par une armée de réfugiés, de nègres et d'Arabes tandis que vos frères et vos maris seront au front. " Or, l'abbé Perrot en reçoit livraison : " C'est dans une cabane, dans son jardin qu'étaient cachées des armes débarquées sur la côte du Trégor, rappelle avec admiration, pour illustrer le courage militant de l'abbé Perrot, Per Denez, ancien directeur du département de Celtique de l'université de Rennes II et ancien vice-président de l'Institut culturel et du Conseil culturel de Bretagne .
Le prétendu apolitisme de l'abbé, toujours présenté comme un inoffensif défenseur de la langue bretonne, n'est qu'un leurre : signataire, aux côtés de Hemon, Herrieu, Delaporte et Fouéré, du mémoire adressé aux autorités allemandes le 22 septembre 1940, il collaborait au poste de Radio-Rennes créé par les services de propagande du Reich, ainsi qu'à la chronique de Lan hag Herve du journal fasciste La Bretagne, au Comité consultatif de Bretagne, enfin, il était en relations suivies avec Fouéré, Mordrel et son cousin Bricler, qui fut abattu par la Résistance.
On ne peut comprendre l'exécution de l'abbé Perrot qu'en relation avec celle de Bricler, trafiquant et directeur de la revue nazie Stur. En mai 1943, une liste de résistants, liste destinée à la Gestapo, fut trouvée par un comptable acquis à la Résistance, dans le coffre de Bricler. Sur cette liste figuraient des communistes de Scrignac… Or, Bricler se rendit au presbytère de l'abbé Perrot, qui était d'ailleurs le siège de la Kommandantur , il y laissa son fils en pension. L'abbé Perrot, qui venait de publier dans Feiz ha Breiz des articles violemment anticommunistes , abrita les redoutables Bagadou Stourm en manœuvres… Bricler fut abattu par deux résistants le 4 septembre 1943. L'abbé Perrot fut le suivant.
Il est certain qu'il présentait un danger pour la Résistance : des lettres de délation ont été retrouvées au siège du journal La Bretagne, dirigé par Yann Fouéré dont le nom figure sur la liste des agents de la Gestapo en Bretagne. Le buraliste, la receveuse des postes, les jeunes de Scrignac réfractaires au STO furent dénoncés.
On a prétendu que c'est abusivement que le nom de l'abbé Perrot aurait été donné à la milice bretonne sous uniforme de la Waffen SS qui fut créée par Célestin Lainé après sa mort, pour lui rendre hommage et pour le venger. Il aurait écrit une lettre blâmant Lainé - mais c'est oublier qu'il ne le blâmait que parce qu'il était néo-païen et entraînait une jeunesse qui aurait dû se vouer prioritairement à la vraie foi sur des voies inadmissibles (et c'est oublier que cette lettre était adressée à Madame Botros, la femme d'un tortionnaire du Kommando de Landerneau).
Il faut rappeler, au contraire, qu'il était un ardent partisan du PNB nazi : J'ai l'honneur de vous faire savoir que le PNB dirigé par M. Delaporte est un parti qui n'a été et ne peut être, tant qu'il se maintiendra dans la voie qu'il suit maintenant, condamné par l'autorité ecclésiastique, indique-t-il dans la même lettre, avant de préciser : Vous me demandez ensuite s'il est permis de sympathiser avec les Allemands. Cela va sans dire...
Il ne faudrait pas passer sous silence son antisémitisme qui lui faisait, en novembre 1940, louant le duc Jean Le Roux qui avait chassé les Juifs de Bretagne, appeler à faire de même en Bretagne et dans toute l'Europe.
Il n'y a donc aucune raison de douter de ce qu'écrit Guy Lenfant, le chef d'un réseau dépendant du Bureau Central de Renseignement et d'Action de Londres, au sujet de l'exécution de l'abbé Perrot :
En juillet 1943, les services spéciaux viennent me prendre en " Lysander " en France occupée. J'ai dans mes bagages le dossier dit " panier de cerises ", travail exécuté à ma demande, sur ordre de Londres, et confié au chef du renseignement de mon réseau, le commandant de gendarmerie du Morbihan, le futur général Guillaudot.
Dans ce dossier il était joint une demande d'exécution du sieur Bonamy par le commandant Guillaudot, cet individu étant classé comme très dangereux par la Résistance et le rapport d'interrogatoire par les services allemands du nommé Crévic [...] Au vu de ces dossiers, il me fut demandé d'envoyer un câble chiffré à mon radio en France à l'adresse de mon second qui m'avait remplacé à mon départ pour Londres.
Ce câble déposé par moi aux bureaux du BCRA fut transmis aux services radio anglais qui étaient les seuls à posséder le matériel d'émission. Par ce câble il était demandé à mon groupe de tuer les cinq personnes suivantes : de Guébriant, l'abbé Perrot, Bonamy, un séparatiste de Quimper et Crévic.
L'opération " panier de cerises " a eu lieu le 10 juillet . Arrivé à Londres le 20, Guy Lenfant aurait donc câblé fin juillet ou début août l'ordre d'abattre Bricler, l'abbé Perrot et trois autres personnes, dont Budes de Guébriant . Une liste de collaborateurs à supprimer est affichée le 1er novembre sur le monument aux morts de Scrignac. D'après André Geffroy, le militant du groupe terroriste gwenn-ha-du, associé à Louarn et Vissault pour le débarquement d'armes allemandes à Loquirec, et qui allait faire partie du sinistre Kommando de Landerneau, une première tentative d'éliminer l'abbé Perrot aurait eu lieu le 26 novembre. Finalement, c'est le 12 décembre qu'un jeune résistant, Jean Thépaut, fut chargé de passer à l'acte.
En 1936, l'abbé Perrot avait demandé à l'architecte James Bouillé de construire une chapelle dans le style néoceltique du groupe des Seiz Breur créé par le mouvement Breiz Atao. On omet de rappeler que James Bouillé figure sur la liste des agents de la Gestapo et que l'art qu'il pratiquait était un art d'abord fondé sur une défense de la " race bretonne " (l'article 1 des statuts des Seiz Breur indiquait qu'il fallait être de " race bretonne "). Cette création, bien dans le goût de l'abbé Perrot, a des implications idéologiques qu'il est inquiétant de passer sous silence.
On ne devrait pas oublier non plus de signaler que l'organisation Unvaniezh Koad Keo en charge de l'organisation des cérémonies d'hommage à l'abbé Perrot depuis 2006 fait partie d'une dangereuse mouvance d'extrême droite du mouvement breton : au repas, soupe au cochon ou jambon à l'os, salut des drapeaux, prières et discours nationalistes appelant à la haine font partie des symboles qui ne sont pas sans une actualité redoutable.

texte écrit par l'abbé Yann Perrot

1240-1940

Voilà 700 ans les juifs furent chassés de Bretagne

L'ordonnance de Jean Le Roux

Dans les anciens textes bretons, il n'est pas question des Juifs avant le XIIIème siècle. C'est seulement alors qu'on les voit s'insinuer dans le pays et sucer comme ils savent si bien le faire, les biens des chrétiens.
Une telle fureur s'éleva contre eux que le duc Jean Le Roux prit une ordonnance pour les jeter hors de Bretagne.
Cette ordonnance est la plus ancienne ordonnance prise par nos Ducs qui nous soit parvenue sur le papier même où elle avait été initialement écrite ; M. de la Borderie, l'historien de la Bretagne, l'avait gardée dans ses papiers ; elle est écrite en latin ; en voici la majeure partie traduite en breton :
Jean, Duc de Bretagne et le Seigneur de Richemont saluent tous ceux qui liront cette lettre. Ecoutez bien. Nous, à la demande des évêques, des abbés, des nobles et des vassaux, après avoir cherché attentivement le bien du pays, chassons de Bretagne tous les Juifs qui s'y trouvent.
Ni Nous ni les gens de notre suite n'en souffrirons un seul d'entre eux sur nos terres et ne voulons non plus voir nos sujets en souffrir sur les leur.
Ceux qui ont des dettes auprès des Juifs qui résident en Bretagne, nous les déchargeons de ces dettes, quel qu'en soit le montant.
Les terres achetées à crédit, à la demande des Juifs, les meubles et autres biens dont ils ont pris en gage, reviendront tous aux débiteurs ou à leurs héritiers, à l'exception des terres ou autres biens vendus aux chrétiens après jugement rendus en nos tribunaux.
Nul ne doit être accusé ou traîné en justice pour les Juifs tués...
Fait à Ploërmel le mardi d'avant Pâques (10 avril 1240)
Saint Thomas (1226-1274) qui vivait au temps du Duc Jean le Roux disait que les Juifs étaient comme une troupe de passagers qui montent sur un bateau pour faire route et qui, tandis que les chrétiens rament, volent à leur guise tout ce qu'ils peuvent et vont jusqu'à percer la coque du bateau ; il n'y a qu'une chose à faire d'eux, dit le grand Docteur, les obliger à restituer leurs rapines, dédommager les passagers dont ils ont endommagé le bagage et de les mettre à ramer à la place des chrétiens.
Voilà ce que nous devons à nouveau faire d'eux à présent un peu dans tous les pays d'Europe.

Y. V. P.

(Jean-Marie Perrot, Feiz ha Breiz, novembre-décembre 1940, traduction de Françoise Morvan)


lettre écrite par l'abbé Yann Perrot à Yann Fouéré

Scrignac, le 7 mars 1943

Mon cher ami,

Ton article " Les Bretons et le Service du travail " est d'une fort bonne inspiration. Il faut d'autant plus s'occuper de nos jeunes qu'un vent de communisme souffle en ce moment en ce moment violemment sur leurs têtes.
La Bretagne a signalé ce qui est arrivé à M. de Dieuleveult.
Ici, mercredi dernier, 3 mars, les jeunes astreints au service obligatoire du travail n'ont pas voulu se faire inscrire, ni passer la visite médicale. Il y a eu ici trois ou quatre inscriptions et il n'y a eu à passer la visite que 23, paraît-il, dans tout le canton.
Nos jeunes scrignaciens se sont particulièrement distingués. M. Floc'h, notre maire, en voyant qu'ils ne venaient pas se faire inscrire avait dressé lui-même la liste de ceux qui devaient passer la visite médicale, le lendemain.
Ayant su cela, nos violents entourèrent notre magistrat en proférant les pires menaces , le mirent à genoux sur la table de la mairie et l'obligèrent, séance tenante, à présenter des excuses et à donner sa parole d'honneur qu'il n'enverrait aucune liste de mobilisables le lendemain à Huelgoat.
On me signale d'autre part que M. Guégoy de Traoden le maire de Plounéour-Ménez a été enfermé toute une journée dans la mairie. N'est-il pas temps de protéger sérieusement nos magistrats contre ces bandes d'énergumènes qui n'écoutent que la radio de Londres.
Tu peux profiter de ces détails, sans révéler le nom de celui qui te les a donnés, car, ici, nous sommes dans un pays aussi communiste que la banlieue rouge.

Kenavo ha bennoz Doue dit,
Y.M. Perrot


lettre écrite par l'abbé Yann Perrot à Yann Fouéré

Scrignac, le 10 mars 1943

Mon cher ami,

Je te parlais l'autre jour de l'effervescence des jeunes de Scrignac, et de ce qu'ils avaient fait au maire. Depuis, ils se sont encore distingués ; sur les routes, ils tracent toutes sortes d'inscriptions : Vive l'armée rouge qui vous délivrera ; Laval au poteau : à bas les boches ; des dessins reproduisant la faucille et le marteau ; le fascisme nous fera crever.
Je viens de relever sur la porte du cabinet de la bascule publique la menace ci-jointe :
"MM. les Maires,
Prenez garde, vous avez signé votre condamnation à mort en vendant les jeunes gens de votre commune à Hitler.
Un bon Français !"
J'aime à croire que vous n'avez pas eu trop à souffrir du bombardement de Rennes qui, d'après ton journal, a fait 200 victimes !

Kenavo ha bennoz Doue dit,
Y. V. Perrot

PS. Par "MM. les Maires" il faut entendre M. Barbier, l'ancien maire, actuellement adjoint, et M. Floc'h, le maire actuel.
On vise M. Barbier, qui est bachelier, qui a une bonne instruction, et que l'on soupçonne d'être, en tout, l'inspirateur du nouveau maire .