BALS CLANDESTINS
A LOUARGAT EN 1942

Archives Départementales de Saint-Brieuc - liasse 2W138
Pendant l'occupation allemande il était interdit d'organiser des bals, ceux-ci se faisaient clandestinement dans des endroits retirés loin de toute surveillance.
Les gendarmes Français faisaient la "chasse" à ces bals clandestins et lorsqu'ils avaient écho de l'organisation d'un bal ils se rendaient sur place et confisquaient les instruments des musiciens.
A Louargat des bals se sont tenus au Parkou sur la route de Saint-Éloi dans une maison abandonnées, à Saint-Jean sur la route de Gurunhuel...
4 Avril 42

Le PREFET des COTES-DU-NORD

à Monsieur le SOUS-PREFET de GUINGAMP

Objet : Bal clandestin à Louargat.

J'ai l'honneur de vous adresse ci-joint, aux fins d'enquête, le texte d'un article paru dans le bulletin paroissial de Louargat en date du 29 Mars 1942, relativement à un bal clandestin.

BULLETIN DE LA PAROISSE

UN SCANDALE A LOUARGAT

Nous ne pouvons passer sous silence le fait qui s'est passé dimanche dernier dans la paroisse. Le scandale à été maudit par Notre Seigneur Jésus-Christ, et c'est le devoir du pasteur de le dénoncer.

Le dimanche de la Passion, c'est à dire le jour ou l'église invite les fidèles à méditer les souffrances d'un Dieu qui s'apprête à mourir pour expier les péchés du monde, la jeunesse de Louargat a voulu commémorer ces souffrances divines en organisant un bal (au mépris de la loi) dans une carrière, située à Pen-ar-Stang.

Un bal en Carême a toujours révolté le sens chrétien. Un bal au temps de la Passion du Christ est une injure insigne à Notre Seigneur Jésus-Christ et les parents (il en est de bonne famille m'a t'on dit) qui ont permis à leurs jeunes gens ou à leurs jeunes filles de s'y rendre, sont gravement coupables…

La gravité du péché s'aggrave du fait que l'on ose s'adonner à de pareilles indécences (pour ne pas dire plus) lorsqu'on a des parents prisonniers ou que l'on sait que beaucoup de nos frères soufrent de la faim et des privations de toutes sortes, particulièrement dans les villes.

Tout cela dénote un sens chrétien annihilé mais aussi un manque total de cœur devant la souffrance d'autrui.

L'impureté est toujours cruelle… surtout ce qui arrive souvent lorsqu'elle est accompagnée d'ivresse… Le sang déjà versé à Louargat et à Pen-ar-Stang, dans un temps qui n'est pas si éloigné de nous aurait du retenir certains parents vraiment trop inconscients…

Un pareil scandale n'est pas de nature à attirer sur eux qui s'y adonne les bénédictions divines…

Il ne nous reste plus qu'un souhait à formuler et nous le formulons ardemment, c'est que la ferveur des communions pascales écarte de notre paroisse la colère du Ciel. La prière des justes, surtout lorsqu'elle est accompagnée de pénitences ou de sacrifices est génératrice de grâces salvatrices. C'est sur cet espoir que nous terminons cet article qui n'a été inspiré que par l'affection toute paternelle que nous portons à tous nos paroissiens sans exception…

QUETEUSES : Sont invitées à quêter pendant le mois d'Avril : Marie BECHEC de Lein-Haleg et Augustine SCOLAN.

QUETEURS - Nous remercions Amédée LE CAM et Jean HAMON de la ponctualité qu'ils ont mise à quêter et à porter la Croix aux processions depuis un an et nous invitons à rendre les mêmes services Désiré L'ANTHON et Joseph LE ROUX

L'imprimeur-gérant : A. CUDENNEC

MA PAROISSE

BULLETIN RELIGIEUX HEBDOMADAIRE DE

LOUARGAT & ST-ELOI

NOUVEAUX TROGLODYTES

5.4.42

Il existait autrefois, dit-on, dans l'antiquité, au sud-est de l'Egypte, une peuplade qui vivait exclusivement dans les cavernes, c'est pour cela qu'on les avait nommés les "troglodytes".

On croyait la race disparue depuis longtemps. Il n'en est rien.

Depuis la guerre elle revit en Bretagne ou elle a diverses ramifications. Dans certaines communes elle recherche la solitude des forêts… ailleurs, et c'est le cas à Louargat elle préfère la profondeur des cavernes ou des carrières abandonnées.

Une caractéristique des nouveaux troglodytes, c'est qu'ils ne se rencontrent guère parmi eux que de la jeunesse, une jeunesse qui aime passionnément la musique et la danse… c'est d'ailleurs pour s'abandonner à ce sport (interdit à juste titre depuis la guerre par la loi) qu'elle recherche les lieux éloignés des villes des bourgs et des agglomérations.

Pour ne citer qu'un cas : est-il vrai, oui ou non, que la jeunesse de Louargat, méprisant avertissements et adjurations à elle adressés pour le scandale donné le Dimanche de la Passion a récidivé dimanche dernier ?

Conviée à faire ses Pâques avec le reste de la paroisse elle a préféré commémorer la mort du Christ en s'abattant joyeusement au fond d'une carrière qui fut jadis exploitée pendant la guerre de 1914.

Il paraît que les anciens troglodytes étaient gens très religieux et particulièrement secourables les uns aux autres.

Les nouveaux ont, semble-t-il, le sens religieux complètement obnubilé, pour se permettre de jeter à la face du Christ labouré par les fouets, l'insulte de leur luxure…

Quant à la charité, ils n'en ont oure : pourvu qu'eux s'amusent (même au mépris des lois humaines…) qu'est-ce que leur fait que d'autres (frères, amis, concitoyens) souffrent de l'exil ou dansent, le ventre creux, devant l'anse du panier vide…

Est-ce pour permettre ce nouveau scandale à vos fils et à vos filles, que vous avez fait vos Pâques, parents chrétiens de Louargat ?