Premier acte ouvert de résistance, une distribution de tracts du Front National fut organisée à Louargat et à Saint-Éloi. À cette distribution participèrent Bernadette LALÉS, Marie et Angèle LE VÉZU, Yves DUBOURG, Robert LE BRUN, Armand TILLY, Alexis FERLICOT tous de Louargat, Yves MINOUX de Saint-Éloi, Emmanuel COSSIN, mon cousin de Colombes (venu du Rhun en Ploubezre passer quelques jours) et quelques autres personnes.
Ces tracts appelaient la population à entrer en lutte pour chasser l'occupant, ils étaient entreposés chez les sœurs Angèle et Marie LE VÉZU, au bourg.

Ensuite, mon cousin Emmanuel COSSIN et moi, nous avons posé près du monument aux morts un écriteau rappelant le sacrifice des anciens, appelant la population à se mobiliser pour entrer en lutte contre l'occupant. Deux Allemands nous ont vu alors que nous venions de poser l'écriteau, mais nous n'avons pas été inquiétés.

Peu après, Bernadette LALÉS, ayant appris que les Allemands avaient eu connaissance de la distribution de tracts et patrouillaient dans le bourg de Louargat, alerta les sœurs LE VÉZU et le reste des tracts fut brûlé dans la cuisinière de Marie LE VÉZU. Les Allemands vinrent fouiller chez elle, mais sans résultat ; mon cousin Emmanuel qui se trouvait dans la maison fut arrêté, emmené à l'école des garçons puis relâché le lendemain sans être autrement inquiété et put partir pour Paris le lendemain : il était embauché au Gaz de France.

Entre-temps, le recrutement d'autres résistants s’était poursuivi avec toutes les précautions d'usage — recrutement en vue de préparer les futurs combats mais aussi de cacher d'éventuels camarades recherchés et de recueillir des renseignements...
En général, les gens contactés étaient connus pour leur antipathie envers l'occupant. Il leur était proposé de rencontrer un responsable…

La veille du 11 novembre, alors que je me rendais à bicyclette à Ploubezre après Saint-Sylvestre en Saint-Eloi me dirigeant vers Pluzunet, je fus arrêté sur la route par une cousine de mon épouse, Hélène CARMES, qui tenait une exploitation agricole à Kernanec, elle me dit : "Armand surtout ne vas pas vers le bourg de Pluzunet car les Allemands arrêtent tout le monde, un Allemand a été tué par les patriotes".
En fait ce jour là, je le sus plus tard, Georges OLLITRAULT (de Saint-Caradec), Emile HENRY (de Ploumilliau, fusillé le 6 mai 1944 à Ploufragan), François LAGADEC (de Lannion, tué le 26 juin 1944 lors d'une embuscade à Peumerit-Quintin) et Etienne LE NENAN (de Ploumilliau) avaient tué un adjudant feldgendarme de Plouaret sur la route de Bégard à Vieux-Marché entre Lann-Consortet et la chapelle du Christ.
Je raconte cet épisode pour montrer la solidarité précieuse de la population, sans ces gens là rien ne fut possible. Ainsi Hélène CARMES qui connaissait sans doute mon appartenance à la Résistance m'évita de tomber dans la gueule du loup, avertis je m'en retournais à Louargat. Merci Hélène.